Dans la tradition des sœurs de la Miséricorde de Bordeaux, Marie Thérèse de Lamourous choisit comme fête patronale le 05 août, fête de N.D. des Neiges, mais sous l’invocation de Marie Mère de Miséricorde.
Pour l’œuvre qu’elle venait créer, Marie était la Mère pleine de tendresse et de miséricorde :
« Divine Marie, tous les chrétiens vous donnent des noms en rapport avec leur état particulier, mais pauvres pécheresses, lequel pouvons-nous nous permettre de vous donner ? Il en est un cependant, un seul qui convient tout à la fois, à votre généreuse tendresse et à notre profonde misère, c’est celui de Mère de Miséricorde !!!
Entrons davantage dans ce mystère de Miséricorde dont Marie est comme « sa première étoile »
Marie est tout d’abord l’immaculée, la créature préservée de toute trace du péché, par pure miséricorde de Dieu.
« La miséricorde l’enveloppe donc depuis le départ, totalement et complètement ; toute sa vie ne cesse d’être la réception en plénitude de la miséricorde. Cette miséricorde est destinée à l’introduire dans l’amour, mais c’est un amour qui prend une nuance spécial puisque, quand l’amour de Dieu est communiqué à une créature, il prend nécessairement la forme d’un amour de miséricorde. Marie est le chef d’œuvre de cette Miséricorde » MD Philippe
Le dessein de Dieu après la chute est un plan de Miséricorde : « Examine, ô homme, le dessein de Dieu ; reconnais le plan de la Sagesse : c’est un plan de miséricorde… au moment de racheter le genre humain, Il en dépose tout le prix en Marie… » Elle fut choisie de toute éternité ; elle fut connue d’avance par le Très Haut et préparée par Lui, elle fut gardée par les anges, préfigurée par les patriarches et promise par les prophètes » St Bernard
Le choix de Marie par le Père se fonde sur l’extrême gratuité de son amour paternel, qui la rend « comblée de grâce ». Le Père déverse en elle la plénitude de sa miséricorde en vue de sa maternité messianique… Sans aucun mérite de sa part, Marie été préservée de toute trace du pèche et de ses conséquences, « par une grâce venant de la mort de son Fils » Elle est la première du genre humain en qui il a été fait miséricorde de manière unique et extraordinaire, et elle le sait. Et son Fiat est la réponse de Marie à cette Miséricorde du Père.
Bouleversée par la salutation de l’ange Gabriel, Marie reconnait l’infinie miséricorde du Père, qui « a posé son regard sur l’humilité de sa servante » (Luc.1, 48)
« Exulte, réjouis-toi », dans ces paroles, Marie reconnait les annonces prophétiques d’accueil du Messie (So 3,14 ; Za 9,9).
Comblée de joie et d’émotion Marie chante dans son Magnificat et pour tous les âges de l’humanité le salut donné par Dieu « Sa miséricorde s’étend d’âge en âge »
Ainsi, comblée par la grâce prévenante de Dieu, Marie se trouve prédisposée particulièrement à être miséricordieuse.
Comme le rappelle le concile Vatican II, Marie continue de manifester, au cours des âges, sans tendresse aux frères de son Fils, « son rôle dans le salut ne s’interrompe pas ».
La compassion de Marie est toujours présente dans l’histoire. Ce trait est particulièrement frappant dans diverses apparitions mariales reconnues par l’Église ( 1531/Guadeloupe , 1830/ la Rue du Bac, 1858/Lourdes, 1870/Pontmain, 1917/Fatima
Ces apparitions viennent toutes de sa tendre compassion pour l’humanité blessée.
Marie est la Mère de Jésus, Fils de Dieu, qui par elle, est la Miséricorde faite chair et de se fait « personne n’a connu comme Marie la profondeur du mystère du Dieu fait homme. Sa vie entière fut modelé par la présence de la miséricorde qui a pris chair en elle » Pape François
Et Richard de Saint Victor (XII siècle) dira : « Marie est devenue Mère de Dieu en vue de la Miséricorde »
Et le Saint Curé d’Ars disait : « dans le cœur de la Très Sainte Vierge, il n’y a que la Miséricorde »
Nous savons bien qu’une maman a une tendresse distincte, pour chacun de ses enfants, en particulier pour celui qui souffre ou qui est le plus fragile. Ce n’est pas par hasard si l’un des mots de la Bible pour designer la miséricorde évoque les entrailles maternelles.
Comme le souligne Saint Jean Paul II, l’amour miséricordieux chez la Mère de Dieu « se fonde sur le tact particulier de son cœur maternel, sur sa sensibilité particulière, sur sa capacité particulière de rejoindre tous ceux qui acceptent plus facilement l’amour miséricordieux de la part d’une mère »
Marie accompagne ses enfants tout au long de leur vie, et elle les encourage à se tourner vers son Fils, et comme à Cana elle nous dit « Faites tout ce qu’Il vous dira ».
Dans la Bible il y a l’annonce d’un Messie glorieux, fils de David, qui restaurerait la royauté en Israël, mais aussi d’un Messie souffrant.
Marie sait depuis la disparition de l’enfant Jésus au Temple, que sa participation à l’effusion de la Miséricorde de Dieu sur l’humanité n’ira pas sans souffrance. Selon la prophétie de Siméon, cette souffrance transpercera son cœur comme un glaive.
Saint Jean Paul II écrit : « Marie est aussi celle qui d’une manière particulière et exceptionnelle a expérimenté la Miséricorde et en même temps rendu possible par le sacrifice du cœur sa propre participation à la révélation de la miséricorde divine » c’est-à-dire de la fidélité absolue de Dieu, à son amour, à l’alliance qu’il a voulu de toute éternité avec l’homme et toute l’humanité.
« Jésus voyant la mère…dit à la mère » et non à sa mère. Marie est désormais La Mère de toute personne humaine. Elle reçoit de son Fils comme testament, un amour maternel pour tout homme, d’autant plus fort qu’il lui a coûté les douleurs et les larmes de la passion et de la mort de Jésus.
Après cet enfantement douloureux par la Croix, elle entre dans la joie de la nouvelle naissance des disciples, de l’Église, du don de l’Esprit Saint le jour de la Pentecôte.
Marie éprouve une tendresse maternelle pour tous ses enfants, à elle s’applique le sens latin de miséricorde, elle a le cœur touché par la misère des autres et sa prière accompagne ceux et celles qui ont le plus besoin de consolation et de soutien dans toute sorte d’épreuve et de maladie. Et encore plus particulièrement avec tous ceux qui sont en butte à la haine du Démon ;
« Je mettre une hostilité entre toi et la Femme…Elle t’écrasera la tête et tu l’atteindras au talon » ; Par ce texte, nous pouvons comprendre que le démon n’ayant aucun pouvoir contre Marie exerce à son égard une hostilité farouche, et il cherche à la blesser dans ses enfants.
Plus encore, « A la Croix, Marie est celle qui connait, le plus à fond, le mystère de la miséricorde divine. Elle en sait le prix et combien il est grand » (DM) et Marie intercède sans cesse pour les pécheurs, elle sait comment les toucher, les tourner vers la Miséricorde de Dieu, elle est en vérité : « refuge des pécheurs et nous l’invoquons : priez pour nous pauvres pécheurs…et les nombreuses apparitions de Marie révèlent ce message.
Au fil de l’histoire…
Dès le III siècle nous retrouvons l’invocation : « Sous ta miséricorde, nous nous réfugions », un moine d’Égypte a copié sur un papyrus une prière à Marie, qui étais déjà populaire et qui par la Grèce et Rome, parvint en France au temps de Carolingiens : nous l’appelons le Sub tuum… il se agit bien de la même prière de confiance à Marie Médiatrice de toute grâces.
Cette prière est émouvante par sa manière d’en appeler à la miséricorde de Marie et c’est beau de voir que c’est sous ce vocable que les premiers chrétiens ont aimé avoir recours à Marie, se réfugier auprès d’elle. Elle contient aussi l’une de toutes premières mentions connues du titre de « Mère de Dieu » deux siècles avant la proclamation officielle lors du concile de trente (431)
La miséricorde, c’est la tendresse pleine d’indulgence d’une mère pour ses enfants. Cette Miséricorde d’une mère est le reflet, le miroir humain et le relais de la tendresse d’un Dieu qui est autant Père que Mère.
Au cours du premier millénaire, nous trouvons de nombreux témoignages concernant la clémence, la bonté et la miséricorde de Marie.
(521) Jacques de Saroug, évêque syrien, semblerait être le premier à avoir attribué à Marie le titre de « Mère de Miséricorde », titre qui sera ensuite diffusé en Occident comme le montre la prière mariale du Salve Regina (XIe siècle), œuvre de Herman le Contrefait(1013-1054), moine de Reichenau ou d’Adhémard de Monteil, évêque du Puy ?
Romanos le Mélode (première moitié du VI siècle) chante dans une de ses hymnes « qu’au Miséricordieux convient une mère miséricordieuse ».
Dans la Vie de Marie de Maxime le Confesseur (660), à propos de dernières années de la Vierge Marie, il est dit : « Sa miséricorde n’était pas seulement pour ses proches ou ses connaissances, mais aussi pour les étrangers ou les ennemis, parce qu’elle était véritablement la mère de la miséricorde, la mère du miséricordieux… »
Commentant l’invocation « Tourne vers nous tes yeux miséricordieux » saint Alphonse appelle Marie la mère qui est « tous yeux, afin de nous secourir, nous misérables, sur cette terre ».
Richard de Saint Laurent nous dit aussi : « Puisque les yeux de Marie sont des yeux de mère, et la mère ne regarde pas seulement son enfant. Pour qu’il ne tombe pas, mais encore pour qu’une fois tombé elle le relève ».
Saint Bernard a écrit que Marie s’est faite toute à tous et a ouvert à tous le sein de sa miséricorde, afin que tous en reçoivent : l’esclave le rachat, l’infirme la santé, l’affligé le réconfort, le pécheur le pardon, Dieu la gloire ; et avec cela, il n’y a personne, du moment qu’elle est le soleil, qui ne participe de sa chaleur ; »
« Qu’on ne parle plus de ta miséricorde, Vierge bienheureuse, si quelqu’un se rappelle t’avoir invoqué dans ses difficultés sans que tu sois venue à son secours. Nous te petits serviteurs, nous te félicitons de tes autres vertus, mais de ta miséricorde, nous nous en félicitons nous-mêmes. La virginité nous la louons, l’humilité nous l’admirons, mais la miséricorde a, pour les malheureux, une saveur plus douce » « Regarde l’étoile…si tu la suis, point ne t’égares ; si tu la pries, point ne désespères, si tu la gardes dans ta pensée, point de faux pas. Qu’elle te tienne, point de chute ; qu’elle te protège, plus de crainte ; avec elle pour guide, plus de fatigue ; avec sa bienveillance, tu parviens au port ».
Dans l’église Ethiopienne, connue par son intense dévotion mariale, il existe une tradition très ancienne et très répandue à propos de l’existence d’un Pacte de Miséricorde entre Jésus et sa Mère. La fête est célébrée le 16 Yakatit = 10 février… « Toi, Seigneur accorde la magnifique joie que l’œil ne voit pas et que l’oreille n’entend pas, et que l’esprit humain ne peut imaginer ! Je te prie et te supplie, ô Seigneur, pour tous ceux qui croient en moi : sauve-les » Jésus répondit : « Oui, comme tu as dit, j’accomplirai pour toi chacun de tes désirs ».
La miséricorde de Marie, en plus de la liturgie qui est son lieu le plus significatif, est également célébrée dans l’art tan oriental qu’occidental.
L’Église russe célèbre depuis le XII siècle, le 1er octobre, la fête de la protection de Marie, pour faire mémoire de la médiation maternelle de Marie, symbolisée par le manteau étendu comme protection sur la ville et tous ceux qui s’adressent à elle… et dans l’icône de l’école de Novgorod du XV siècle « nous voyons quelque chose de plus qu’une humanité blottit sous le manteau de Marie… nous pouvons parler plutôt d’une communion spirituelle entre Marie et les saints rassemblés sous son manteau… » et la liturgie nous fait prier… » Ô très sainte Dame, couvre nous de ton admirable manteau, protégeant le peuple de tout mal. Aujourd’hui aussi, ô notre Dame, envoie nous ton abondante miséricorde ».
Dans l’art occidental également, on connait les toiles de la Vierge de miséricorde, caractérisée par le manteau ouvert de Marie qui protège ses fidèles. Grégoire de Tours diffusa, en occident, la légende de l’enfant juif sauve des flammes par le manteau de Marie. Certains ont même relève dans le Jugement dernier de Michel-Ange un signe très significatif de la miséricorde de Marie, qui adoucit l’atmosphère de sévérité qui semble régner sur la chapelle Sixtine.
Marie accueille la miséricorde, elle se laisse habiter par elle, elle la rayonne..
Prier Marie nous aide ainsi à mieux comprendre ce qu’est la miséricorde, à l’accueillir nous aussi et en vivre, la témoigner à notre tour et pour cela, Marie est à nos côtés, elle nous accompagne…pour nous montrer aussi que faisant confiance à Dieu, en écoutant sa Parole, ce chemin de miséricorde est aussi un chemin de joie, comme celle qu’elle a expérimenté lors de la visitation, comme celle d’un autre matin de Pâques, car dans la Miséricorde une nouvelle création est à naître.
Pape François, « la Miséricorde change le monde »
Mgr de Monléon, « La miséricorde est au cœur de l’Évangile. Au cœur de la Miséricorde, le bonheur ! »
« Seules quelques brèves paroles de la très Sainte Vierge
Nous sont rapportées dans l’Évangile.
Mais ces quelques paroles sont comme des lourds grains d’or pur » Edith Stein
Extraits de
« Miséricorde, bonheur pour l’homme » de Albert-Marie de Monléon
« Marie dans l’Eglise et dans le monde » Robert Pannet
« Dieu, Père de Miséricorde » Conseil de présidence du Grand Jubilé 1998
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