« Dieu est jeune » (Robert Laffont, 2018), retrouvez quelques extraits du livre-entretien du pape François.
Le Pape François dédie l’année 2018 à la jeunesse. Pour la première fois dans un livre qu’il signe lui-même, le Pape François s’adresse aux jeunes du monde entier, qu’ils soient catholiques ou non : un projet qui lui tient à cœur et sur lequel il travaille depuis le début de son pontificat. « Dieu est jeune, il est toujours neuf ».
Par ces paroles, le pontife affirme que les jeunes sont faits « de la même étoffe » que Dieu, et qu’ils doivent avoir une place centrale dans notre société. Il est nécessaire, dit aussi le Pape, de trouver la force et la détermination, mais aussi la douceur pour créer un pont entre les générations : leur étreinte permettra à la société de se régénérer, au bénéfice de tous.
Dans ces conversations, le Pape François évoque les grands thèmes de notre société contemporaine avec force et passion : le climat, les extrémismes, la mort, la pauvreté, la dignité, l’espoir, l’individualisme, la corruption, l’éducation…
« Pour comprendre un jeune aujourd’hui, il faut le comprendre en mouvement. On ne peut pas rester immobile et prétendre être sur la même longueur d’onde que lui. Si nous voulons dialoguer, nous devons être mobiles, et c’est lui alors qui ralentira pour nous écouter, c’est lui qui décidera de le faire. Et quand il ralentira, une autre figure commencera : un mouvement dans lequel le jeune adoptera un pas plus lent pour se faire écouter, et où les anciens accéléreront pour trouver le point de rencontre. Ils se contraignent mutuellement : les jeunes à aller plus lentement, et les vieux plus vite. Voilà comment nous pourrons progresser. Je voudrais citer Aristote qui, dans sa Rhétorique au livre II chapitre 12, nous dit : « Pour les jeunes gens, le passé est encore peu de chose, et l’avenir beaucoup. En effet, au premier jour de l’existence, on trouve que le souvenir n’est rien et que est tout. Ils sont faciles à tromper, pour la raison que nous avons donnée ; en effet, ils espèrent volontiers. (…) Et ils sont plus braves, car ils sont prompts à s’emporter et ont bon espoir ; le premier de ces traits de caractère fait que l’on n’a pas peur, et le second donne de l’assurance. En effet, on n’a jamais peur quand on est en colère, et l’espoir d’obtenir un bien rend téméraire. » […]
Un jeune a quelque chose d’un prophète et il faut qu’il en prenne conscience. Il a les ailes d’un prophète, l’attitude d’un prophète, la capacité à prophétiser, à dire, mais aussi à faire. Un prophète d’aujourd’hui a certes la capacité de condamner, mais il a surtout celle d’offrir une perspective. Les jeunes possèdent ces deux qualités. Ils savent condamner, même s’ils expriment parfois maladroitement leurs jugements. Et ils ont aussi la capacité à scruter l’avenir et à voir plus loin. Mais les adultes sont cruels et ils abandonnent souvent à elle-même cette force des jeunes. Souvent ils déracinent les jeunes et, au lieu de les aider à être des prophètes pour le bien de la société, ils en font des orphelins et des exclus. Les jeunes d’aujourd’hui grandissent dans une société sans racines. […]
C’est pourquoi l’une des premières choses auxquelles nous devons penser en tant que parents, en tant que famille, en tant que pasteurs, ce sont les paysages où s’enraciner, où générer des liens, où faire grandir ce réseau vital qui nous permet de nous sentir chez nous. C’est une terrible aliénation pour quelqu’un de constater qu’il n’a pas de racines, cela signifie n’appartenir à personne. […]
Aujourd’hui, les réseaux sociaux donnent l’apparence d’un espace de connexion avec les autres ; Internet offre aux jeunes le sentiment d’appartenir à un groupe unique. Mais le problème d’Internet est précisément son caractère virtuel : il laisse les jeunes dans les airs, et en conséquence extrêmement volatils. J’aime rappeler une phrase du poète argentin Francisco Luis Bernárdez : « Por lo que el árbol tiene de florido, vive de lo que tiene sepultado ». « Quand nous voyons de belles fleurs sur un arbre, nous ne devons jamais oublier que si nous jouissons de cette vision, c’est grâce à ses racines. »
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